Le voyage d’Elena ALVAREZ SANCHEZ dans le monde de la bio-informatique au service de l'ingénierie moléculaire

29/05/2024

Pour continuer notre série d’articles sur « les Femmes au Cœur de la Science à l’US2B », nous vous invitons à découvrir le portrait d’Elena Alvarez Sanchez : doctorante en seconde année dans l’équipe « Bioinformatique Structurale » au sein du laboratoire.

L’équipe « Bio-informatique structurale » compte aujourd’hui dans ses rangs Elena Alvarez Sanchez, qui s’attaque à l’univers des biomimétiques d’anticorps par le biais de sa thèse.

Un parcours atypique

D’origine espagnole, Elena s’envole pour la France à l’âge de 17 ans pour mener ses études à l’école nationale supérieure d’architecture de Nantes.Intéressée par l’aspect théorique mais sceptique face à la réalité du métier, la jeune étudiante décide de voguer vers un tout autre horizon : la biologie ! La découverte de l’univers de la bio-informatique a été pour Elena une révélation, à tel point qu’elle a poursuivi son cursus dans un master d’informatique à l’université de Nantes. Tout s’est alors enchainé très naturellement :après un stage à l’US2B en biotechnologie vaccinale en Master 1, Elena réalise en seconde année de master un stage auprès d’Affilogic, société biotechnologique nantaise spécialisée dans le développement de nanofitines. Une thèse CIFRE entre l’US2B et l’entreprise Affilogic représente alors une excellente opportunité. Quel est l’objectif de la thèse ? Il s’agit de comprendre ce qui caractérise une interaction entre une nanofitine et une cible via des approches de simulation moléculaire dépendantes de puissances de calcul diverses.

Évidemment, même si Elena semble à l’aise comme un poisson dans l’eau, une thèse n’en serait pas une si elle n’était pas accompagnée de quelques difficultés. Après une phase très théorique de compréhension du sujet et de recherche bibliographique, Elena s’est attelée à ses premières prédictions.

« Au départ, ça se passait très bien. Et au bout d’un moment, il y a eu un résultat expérimental qui n’était pas totalement en accord avec ce que j’avais prédit. A ce moment-là, tu te retrouves face à un mur et tu remets un peu tout en question… mais finalement avec du recul, ça te permet de relativiser et ce qui au départ semblait négatif, devient presque positif ».

Relativiser, une clef essentielle pour un projet de thèse. Les superviseurs de la doctorante – Stéphane Téletchéa, Bernard Offmann et Simon Huet  ont, selon elle, joué un rôle crucial dans son épanouissement au sein du laboratoire.
« J’ai de la chance parce que ça se passe très bien avec mes trois encadrants et les discussions scientifiques sont très inspirantes. Ça m’a aidé dans ces moments un peu plus turbulents. »

« On pourrait penser que la bio-informatique c’est très différent de ce qu’on fait en paillasse,mais en fait ça se complète très bien. La communication entre expérimentateurs et bioinformaticiens est très importante pour partager les résultats et pour améliorer ensemble le système ».

Les nanofitines, parlons en !

Ce sont de petites protéines d’affinité, particulièrement stables, qui ont pour origine une autre protéine qu’on nomme Sac7d. Cette dernière est produite par une archée découverte dans les geysers du parc national de Yellow Stone aux États-Unis. Le rôle de Sac7d est alors de se lier à l’ADN de l’archée pour la protéger de conditions environnementales extrêmes, telles que des températures très élevées et des environnements très acides. Pour concevoir les nanofitines, Affilogic modifie la spécificité de Sac7d pour reconnaitre d’autres cibles que l’ADN et envisage ces molécules comme des substituts potentiels aux anticorps. A terme, la start-up nantaise vise à développer le concept pour un usage thérapeutique via l’identification de cibles d’intérêt selon la pathologie.

Étudier l’interaction nanofitine /TNFα2Par

La jeune doctorante est focalisée sur une cible en particulier, le TNFα. C’est une cytokine inflammatoire qui est impliquée dans de nombreuses maladies. On peut citer les maladies inflammatoires chroniques telles que la maladie de Crohn ou la polyarthrite rhumatoïde. La nanofitine N11 développée par Affilogic a pour vocation de mimer un anticorps et de neutraliser le TNFα. C’est cette interaction qu’Elena étudie par des approches de docking moléculaire. L’idée c’est de prédire le lieu de fixation le plus stable de la nanofitine sur le TNFα. Elena utilise également la simulation de dynamique moléculaire. Il s’agit d’une méthode numérique basée sur la mécanique newtonienne qui permet de modéliser l’évolution du système au cours du temps. Les prédictions faites par la jeune femme sont alors testées par des expérimentateurs dans les laboratoires d’Affilogic.

« Souvent, dans les thèses de bio-informatique, ça reste au stade de la prédiction, mais moi j’ai la chance que mes prédictions puissent être testées expérimentalement,c’est l’un des points forts de ma thèse ».

Jusqu’à maintenant, la thésarde a utilisé des approches de bio-informatique structurale basées sur des principes de physique. La troisième année se voudra axée sur l’utilisation des sciences du numérique, et plus particulièrement sur l’intelligence artificielle: Elena souhaite prédire un comportement à partir des données récoltées les années précédentes par une approche de machine learning.

Le machine learning, qu’est ce que c’est ?

Le machine learning ou apprentissage automatique est une branche de l’intelligence artificielle (IA) axé sur la création de systèmes qui apprennent, ou améliorent leurs performances, en fonction des données qu’ils traitent. Pour ce faire,un algorithme décèle des motifs récurrents ou «patterns » dans l’ensemble de données. Celles-ci peuvent être des chiffres, des mots, des images, des statistiques… L’algorithme est alors capable de réaliser des prédictions et d’affiner ses performances au fil du temps en reconnaissant les différents patterns.

Un avenir qui se précise peu à peu… mais alors, académie ou industrie ?

« Ma thèse c’est un peu particulier, je suis entre le monde académique et le monde industrie »

Elena est très satisfaite de travailler sur ce projet de thèse. « J’aime cette liberté qu’offre la recherche ». Pour autant, à l’heure actuelle, Elena se projette plus volontiers dans l’industrie, du fait de son aspect appliqué. Elle se plaît dans la ville de Nantes et n’est pas contre l’idée d’y poursuivre son parcours. Vous aurez peut-être l’occasion de l’y croiser !

1Convention industrielle de formation par la recherche : dispositif visant à renforcer leséchanges entre les laboratoires de recherche publique et les milieux socio-économiquespromu par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
2Tumor Necrosis Factor (Facteur de Nécrose Tumorale alpha)

Par Lénaïg CORDEROC’H

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