Gaëlle Saade vers une radiothérapie innovante
12/11/2024Suite des portaits sur « les Femmes au Cœur de la Science à l’US2B », nous vous invitons à découvrir Gaelle SAADE, doctorante en troisième année dans l’équipe « Mécanisme et régulation de la réparation de l’ADN » au sein du laboratoire.
Au sein des laboratoires de l’ICO dans l’équipe « mécanisme et régulation de la réparation de l’ADN », Gaëlle Saade tente de percer le secret de la radiothérapie FLASH.
D’un continent à l’autre
D’origine libanaise, l’idée d’étudier dans le domaine de la recherche en France a germé dans l’esprit de Gaëlle dès le lycée. La jeune femme a passé le baccalauréat dans sa langue natale mais pas seulement… Comme si cela ne suffisait pas, elle a obtenu son baccalauréat en français la même année ! S’en est suivie une licence en biochimie à l’Université Libanaise pendant laquelle sa volonté de s’envoler pour la France s’est accrue. Lors de son cursus, la cancérologie s’est vite avérée être son domaine de prédilection. C’est alors qu’elle s’est lancée en master de Biologie, Biotechnologie et Recherche Thérapeutique (BBRT) avec une option immunologie-cancérologie à l’Université de Nantes. Malgré la difficulté que pouvait représenter le confinement dans un pays étrangers lors de la pandémie de COVID-19, Gaëlle a franchi la première année de master avec succès. À la suite de cela, un stage à l’Institut de Cancérologie de l’Ouest en deuxième année lui permet d’attaquer la recherche en radiothérapie. L’année suivante, Gaëlle commence son projet de thèse sur la réduction de la radiotoxicité par hadronthérapie à ultra- haut débit de dose.
La radiothérapie à ultra-haut débit de dose, qu’est-ce que c’est ?
La radiothérapie est un traitement qui consiste à exposer les tissus cancéreux de malades à des rayons ionisants de haute intensité destinés à détruire les cellules tumorales. La radiothérapie clinique traditionnelle est caractérisée par un rayonnement X délivré de manière continue dans le cadre d’un traitement qui peut durer plusieurs semaines. Cette technique, certes efficace, présente cependant des effets secondaires : elle touche non seulement la tumeur, mais aussi les cellules saines avoisinantes. La radiothérapie FLASH ou radiothérapie à ultra-haut débit de dose délivre une forte dose de radiation dans un temps très court, en l’espace de quelques millisecondes et en une seule exposition. La technique FLASH peut avoir une même efficacité contre la tumeur tout en évitant les risques d’endommager les tissus sains environnants.
Pour délivrer le rayonnement à très haut débit, l’équipe a besoin d’un peu d’aide. Ils utilisent le cyclotron ARRONAX qui est un accélérateur de particules comme source de protons fortement énergisants. ARRONAX représente un outil précieux pour le projet de Gaëlle. Son accès est cependant particulièrement convoité laissant peu de temps à l’équipe pour travailler avec l’accélérateur de particules. Une organisation de maître s’impose, contrainte à laquelle la doctorante a su s’adapter.
Le poisson-zèbre pour étudier la radiothérapie FLASH !
Pour les besoins de ses travaux, Gaelle utilise un modèle biologique original, le poisson zèbre ou zebrafish. Deux groupes de zebrafish sains sont utilisés : l’un est irradié par radiothérapie conventionnelle et l’autre est irradié via la radiothérapie FLASH. Un effet de protection a alors été observé avec cette dernière. Les dommages observés après irradiation par la radiothérapie FLASH sont moindres comparés à la radiothérapie conventionnelle.
Comment ces dommages sont-ils observés ?
C’est simple, le zebrafish est une excellent modèle de radiotoxicité. Lorsqu’il est affecté par les effets toxiques, le poisson développe un œdème péricardique et se courbe en conséquence. La longueur et la courbure de l’animal sont alors indicateurs des dégâts causés par l’irradiation sur les tissus.
Un second aspect essentiel de ce projet de recherche est l’étude de l’effet de la radiothérapie FLASH sur le système vasculaire du zebrafish. Pour cela, l’expression des gènes est étudiée, notamment les gènes liés aux cellules endothéliales et aux péricytes.
Un petit rappel ?
Les cellules endothéliales tapissent l’intérieur des vaisseaux sanguins, régulant le flux sanguin, tandis que les péricytes soutiennent la structure des vaisseaux et modulent leur perméabilité. Ensemble, ces deux types cellulaires interagissent pour assurer la fonctionnalité et l’intégrité des vaisseaux sanguins.
Le zebrafish a la particularité d’être quasiment transparent lors de sa période embryonnaire ! La doctorante se sert alors de cette spécificité pour étudier la vascularisation. Pour cela, un modèle transgénique fluorescent du poisson-zèbre a été généré. Les cellules endothéliales sont colorées en rouge et les péricytes sont en vert. Cette méthode permet d’explorer en détail la vascularisation de l’animal.
Et sur d’autres modèles biologiques ?
En parallèle, Gaëlle réalise des cultures de cellules endothéliales de la veine ombilicale humaine (HUVEC) associées à un milieu riche en facteurs de croissance pour former des pseudo tubes mimant la formation de vaisseaux. Grace à ce modèle, elle réalise des tests pour comparer l’effet des deux types de radiothérapie sur des cellules humaines, les cellules endothéliales et les péricytes.
Un tout autre modèle est finalement étudié : la souris. En effet, la vascularisation d’une tumeur revêt une importance capitale dans la formation de métastases. Le modèle murin est alors utilisé par Gaëlle pour comprendre l’effet de la radiothérapie FLASH sur le développement des vaisseaux sanguins au sein de la tumeur.
Gaëlle a déjà publié un certain nombre d’articles relatant ses travaux. Les recherches se poursuivent et ouvrent des perspectives intéressantes sur la thérapie novatrice que représente la radiothérapie FLASH.
Sur la voie de l’enseignement
Au cours de sa thèse, Gaëlle s’est donné l’opportunité de s’essayer à l’enseignement auprès d’élèves de la faculté de sciences mais aussi de médecine. L’expérience a été un franc succès puisque la jeune doctorante projette une carrière d’enseignant-chercheur dans son domaine. Elle souhaite poursuivre un post-doctorat en France ou même ailleurs. Guidé par un esprit d’aventure, Gaëlle ne ferme aucune porte et se laisse porter par les opportunités !
« Je suis fière de travailler en cancérologie. Chercher des traitements, c’est une chose qui me plaît vraiment. Si je peux aider à monter, même une petite marche, c’est déjà super ! »
Par Lénaïg CORDEROC’H
Pour me contacter: lcorderoch@hotmail.fr
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