Exploration bactérienne avec Pauline CRETIN
12/11/2024Suite des portaits sur « les Femmes au Cœur de la Science à l’US2B », nous vous invitons à découvrir Pauline CRETIN, doctorante en troisième année dans l’équipe « Ingénierie Moléculaire et Glycobiologie » au sein du laboratoire.
On se lance aujourd’hui dans un tour d’horizon de la thèse de Pauline Crétin dans l’équipe « ingénierie moléculaire et glycobiologie » pour plonger à ses côtés dans l’univers des bactéries.
La Bretagne, ça vous gagne !
Après un baccalauréat scientifique obtenu dans les Yvelines, en région parisienne, un tirage au sort peu fructueux dans sa région natale mène Pauline à l’Université Bretagne Sud sur le campus de Vannes. Malgré un « mal du pays », elle poursuit sa licence en biologie moléculaire et cellulaire et se passionne pas à pas pour la microbiologie. S’en suit une première année de master à l’Université Paris Cité pendant laquelle elle mène un stage au laboratoire de Biotechnologie et Chimie Marine (LBCM) à Quimper. Ce stage la conforte alors dans sa volonté de se spécialiser dans l’étude de la microbiologie en milieu marin.
« J’avais rencontré à la Sorbonne, lors d’un stage en seconde année de licence, le responsable d’un master de rêve entre Sorbonne et le Museum national d’Histoire naturelle, le Master Microbiologie, Environnement, Santé. Celui-ci est très sélectif, 18 places. Fin de master 1, je lui envoie un message en reprenant nos anciens mails et je lui dis : je viens de déposer mon dossier, au plaisir de se retrouver pour un entretien. Il me répond dans la foulée : on se voit demain. Je n’y crois pas mais je montre que je suis motivée. Deux semaines après il me dit : Vous allez recevoir un mail de la secrétaire pour vous inscrire. Et ce master 2, ça a été les plus belles études de ma vie. »
Vient alors le stage de fin de master. Dans ce contexte, Pauline contacte Francois Delavat et travaille à ses cotés sur une bactérie Diazotrophe Non Cynaobacterienne (DNC) en interaction avec une diatomée. C’est alors qu’un financement pour une thèse est proposée. Elle postule alors et se lance dans le grand bain, déterminée.
Pauline n’a jamais réellement réussi à quitter Vannes, m’exp1ique-t-elle. Et pour cause, la jeune femme y crée une association humanitaire et humaniste appelée LEO Club (Leadership, Experience, Opportunity), une branche jeune du LIONS Club International.
« J’ai créé le LEO Club Breizh Vannes en 2020 depuis je suis à la Commission Nationale du développement des effectifs. En ces qualités j’ai contribué à la création de 6 autres LEO Clubs en France ce qui m’a valu la dictinction de la « Melvin Jones ». C’est une aventure humaine extraordinaire. »
La jeune doctorante est pleine de ressources et très engagée, aussi bien dans l’association qu’au sein de l’unité en tant qu’élue Représentante des Doctorants. Elle mène ainsi tambour battant création de sweatshirt, rencontres, conférences et discussions au sein du laboratoire. Mais alors, qu’en est-il de sa thèse?
La bactérie Diazotrophe non Cyanobactérienne (DNC)
Une bactérie diazotrophe, c’est une bactérie capable de fixer l’azote atmosphérique (N2). Ce gaz est abondant dans l’atmosphère mais est biologiquement inutilisable par les organismes. Les DNC transforment l’azote en formes utilisables telles que l’ammonium (NH4+). Cette réaction est possible grâce à une enzyme sensible à l’oxygène et grande consommatrice d’énergie : la Nitrogénase.
A l’heure actuelle, les bactéries diazotrophes les plus étudiées et classées sont les cyanobactéries. Elles contiennent effectivement des pigments photosynthétiques tels que la chlorophylle a qui leur donnent une couleur caractéristique verte et les rends aisément observables.. Néanmoins, les bactéries non cyanobactériennes représentent une grande part des bactéries diazotrophes dans les océans et ne sont que très peu étudiées car très récemment découvertes. Elles sont en effet plus difficilement observables et demeurent pour la plupart un mystère. C’est alors qu’arrive Pauline ! Sa thèse s’appuie sur une recherche exploratoire de l’écophysiologie d’une bactérie diazotrophe non cyanobactérienne isolée de l’intestin de l’oursin : Vibrio diazotrophicus.
Deux molécules essentielles : L’azote et l’oxygène
Pauline s’est posée la question suivante: comment l’expression de l’enzyme (la nitrogénase) est-elle régulée génétiquement ? Pour répondre à une telle problématique, c’est encore une fois de l’exploration… La bactérie est mise en culture dans des milieux plus ou moins riches en azote ou en oxygène pour étudier le mécanisme diazotrophique. L’ARN est alors extrait et séquencé, ce qui permet d’identifier différents gènes potentiellement impliqués dans la réaction. Pauline est alors capable de muter un gène sélectionné chez la bactérie pour étudier son rôle dans la capacité de la bactérie à fixer l’azote atmosphérique. Par exemple, en mesurant l’activité de la nitrogénase ou en quantifiant l’activité d’un gène codant pour l’enzyme (nifH) en créant des biorapporteurs. La création d’un biorapporteur consiste à cloner la région promotrice d’un gène d’intérêt en amont d’un gène « rapporteur » comme la Green Fluorescent Protein (GFP). Ainsi, via un microscope à épifluorescence, elle peut identifier les bactéries exprimant la nitrogénase par leur couleur verte et quantifier cette coloration en lien direct avec l’expression du gène nifH.
Pour poursuivre ses recherches, Pauline s’intéresse à la production d’un biofilm. Il s’agit d’un amas structuré de cellules bactériennes et d’une matrice polymérique protectrice. Le biofilm va alors former une barrière permettant de raréfier l’oxygène disponible pour la bactérie. Les conditions seront alors optimales pour enclencher le processus de diazotrophie.
Au LBCM de Lorient, Pauline souhaite prendre en photo son biofilm par une technique de microscopie en confocal en utilisant un biorapporteur de la nitrogénase. L’objectif est alors de démontrer que la réaction de la diazotrophie se fait au cœur de ce biofilm.
Les recherches se poursuivent et les résultats sont prometteurs, selon la doctorante. Celle-ci se montre fière de son parcours et de l’avancée de sa thèse. Mais qu’en est-il de la suite ?
Pauline place la barre haut
Qui dit microbiologie marine, dit échantillonnage en mer ! Pauline à l’ambition de faire de la recherche, oui, mais sur le terrain. S’aventurer au large de la France ou des Pays-Bas et plonger dans la recherche microbiologique tout en poursuivant son engagement humanitaire, voilà l’idée. La doctorante souhaite également à l’avenir mettre un pied dans le domaine de la diffusion scientifique via des congrès ou des conférences. Des projets ambitieux pour lesquels Pauline semble d’ores et déjà se donner les moyens.
Pour plus d’information, vous pouvez contacter Pauline à l’adresse suivante: pauline.cretin@univ-nantes.fr